Hier à Saint-Louis, des nuages ont sculpté le ciel de noir, de gris et de larmes Quand le déchirement d’une balle a surpris la mort dans notre cathédrale
Une cathédrale dont les remparts ne sont pas de chair de basalte et de minerai Mais bâtis de l’or des humanités aujourd’hui orphelines
Une cathédrale où le silence n’est pas fait de prières
Mais où la lumière ne se perçoit que dans un recueillement nu
Celui auquel n’invite point le tragique de ce funeste destin
Une cathédrale dont la sérénité à pas feutrés se déchausse avant d’entrer
Une cathédrale dont la dignité sans se courber se découvre le chef sur le seuil
Une cathédrale dont la pudeur sans armes est seule invitée au passage
Une cathédrale dont la patience dévêt les uniformes avant de laisser s’ouvrir le portail Une cathédrale dont la religion sans passion s’épuise dans la vérité sans cire
Une cathédrale dont la rumeur s’ébruite dans l’unique souffle des idées
Une cathédrale dont l’éthique est hermétique aux bruits des casernes
Hier à Saint-Louis, des éclairs ont fendu le ciel d’âcres odeurs
Quand le cri d’une balle a clamé le froissement d’un ticket pour l’accès aux œuvres
Des œuvres qui se réclament a cor, a cri et à tue-tête
Tandis que l’indifférence est la seule cinglante réponse
Des œuvres défendues bottes sur asphaltes en rang avec grand bruits
Des œuvres protégées couvre sur chef en rempart contre les galets ramassés
Des œuvres sauves, l’arme au poing, la ceinture en bandoulière et l’uniforme assassine
Les franchises ont rompu, désertées de leur éthique nourricière
Celle de valeurs académiques aux fondements ébranlés qui se fissurent par force exceptions
Qui se nourrissent de la tolérance qui seule admet la différence de vues
Qui cultivent la force de la conviction sans s’en remettre à celle de la poudre
Qui appellent à la communication, au dialogue pour former les nœuds délicats des compromis fragiles et toujours précaires
Dans l’espace franc de notre cathédrale !
Les franchises ont cédé sous les garde à vous empruntés Les franchises ont cédé sous la force requise
Les franchises ont cédé sous les pas chaussés
Les franchises ont cédé à leurs chefs couverts
Les franchises ont cédé aux uniformes découverts
Les franchises ont cédé la cathédrale aux casernes
Hier à Saint-Louis, le tonnerre a rompu le silence sacré de la cathédrale Le silence fin qu’entretenaient les marmites des œuvres sans tiquer
Le silence frugal qui s’insinuait dans les bourses vides
Le silence mince qui retenait les fils des enseignements recousus
Le silence souple de l’entrelacs des années académiques troubles
Le silence léger d’une paix universitaire approximative
Aujourd’hui, le silence du deuil est assourdi
Les cœurs meurtris saignent des pierres aux quatre coins du Sénégal
Les pleurs se confondent dans le bruit des sirènes
Les larmes coulent des émotions et des grenades Les plaies se couvrent de gaz
Dans le tintamarre des irresponsabilités partagées
A l’abri de notre douleur nous couvons une parcelle de lumière
Celle d’une éthique à reconstruire sur les ruines de nos valeurs effondrées
Une éthique dépassionnée qui ne filtre pas la lumière
Une éthique déchaussée dans sa sérénité
Une éthique dont seule la dignité couvre le chef
Une éthique armée de sa pudeur en fleur
Une éthique réinventée
Une éthique de la bienveillance
Demain, peut-être le ciel de Saint-Louis sculptera les nuages de blanc, de gris et d’arc-en-ciel
Demain, peut-être le ciel de Saint-Louis offrira ses éclairs en lumière à la cathédrale restaurée
Demain, peut-être le ciel de Saint-Louis libérera le tonnerre en symphonies
Demain, peut-être Mouhamadou Fallou Sène sera martyre de la paix universitaire retrouvée !
Boubacar Diallo
16 mai 2018
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