Paf ! Il m’a giflée.
Tu sais ce qui est drôle quand on te gifle, c’est que tu ne ressens pas la douleur en premier, tu savais ça ? La douleur vient après. Tu as d’abord l’incompréhension, ensuite le choc et après la douleur. Je ne te parlerai même pas de la perte d’audition temporaire. Que dire de l’humiliation. C’est drôle quand on y pense. Toujours est-il qu’il m’a giflée, à nouveau. J’ai dû ramasser ma dignité à la petite cuillère. Je ne pense pas qu’il existe pire humiliation qu’une gifle. Il m’a giflée.
J’ai vu défiler toute notre vie.
De cette première rencontre à la naissance de Chams,
De ce premier rendez-vous où je me suis rendue compte qu’il me plaisait au jour où j’ai accepté d’être sa femme.
Du jour où je me suis rendue compte que j’aimais cet homme à celui où il a envoyé ses parents demander ma main.
De cette première nuit à cette première gifle que j’ai pardonnée.
Je me sens vidée…
Je ne sais pas quoi faire. Je l’entends me demander pardon. Il dit que c’est une erreur que plus jamais cela ne se reproduira. Je t’entends d’ici me dire que tu m’avais avertie, qu’il lèverait la main à nouveau sur moi encore, qu’on ne rompt pas la spirale des coups en passant l’éponge. Tu as eu raison, il a recommencé, que dois-je faire ? Je suis perdue, j’ai mal. Que vais-je dire à Chams, il n’a que un an. Il doit grandir avec une figure paternelle. Ai-je le droit de le priver de cela ? Et puis, que vais-je devenir ? Et comment vais-je regarder tous ceux qui me prédisaient un retour rapide à la case départ ? Je me sens tellement mal, j’ai honte, tellement honte.
(Rires), je n’aurai jamais cru que je pourrai être un jour une femme que son mari frappe, tu te souviens petites, comment nous traitions cette pauvre Ndoumbé que Aladji battait matin, midi et soir. Luñ ko daawul woon wax amul, on ne lui disait même plus bonjour, tellement elle incarnait la Ñakk fayda suprême à nos yeux, (rires), laisser un homme te battre, hum, faut partir au premier coup !!!!, HUMMMM !!! C’est moi qui en suis au deuxième coup et je suis toujours là, entrain de me poser des questions existentielles, couchée dans notre lit, notre enfant endormi dans les bras.
Je m’en irai demain, aujourd’hui je n’ai la force de rien, ni le courage de mes décisions, j’ai besoin de dormir

Auteure, podcasteuse, sénégalaise. Je suis passionnée d’écriture et je traite essentiellement de sujets autour de notre perception de l’autre, du jugement, des violences ordinaires… J’ai un premier recueil de nouvelles publié en 2018 que vous pourrez trouver ici… J’ai créé du Kokalam en 2017. Année après année, il continue de grandir.
Un des maux tabous de la société sénégalaise, je dirais même africaine…
Il paraitrait que ce ne soit pas seulement sénégalais. Il est profondément ancré chez nous…
Très belle plume💕💖💗