Il m’a parlée de mariage un mois après notre rencontre, ma première réaction a été de me dire Alhamdoulillah, je suis normale! Je ne comprenais pas pourquoi j’étais encore l’une des dernières célibataires de mon groupe de copines.
La petite voix dans ma tête m’a dit, « tu fais peut-être une connerie, tu devrais patienter un peu le temps de mieux le connaitre», je me suis hâtée de la faire taire, oiseau de mauvais augure. Cette petite voix dans ma tête fera mon malheur si elle n’apprend pas à la fermer.
Qu’est-ce qu’une femme peut désirer de plus beau et de plus noble qu’être épouse. Surtout en ces temps où les hommes ne se marient plus, se contentant de multiplier les conquêtes. Moi j’ai la chance incroyable de voir un homme, laisser toutes les portes des maisons du quartier pour venir taper à la nôtre et demander ma main.
Bon, c’est pas vraiment comme cela que ça s’est passé, nous nous sommes rencontrés pendant que j’attendais le bus à la sortie de mes cours, mais c’est tout comme. Il m’a proposé gentiment de me ramener en voiture et m’a dit dès l’entame, qu’il était animé d’intentions sérieuses. Que demander de plus ? Khana neekh.
Il m’a parlée de mariage, tu te rends compte ? Je n’y crois pas, j’ai attendu ça toute ma vie. Je viens d’une famille où la seule parure de la femme est d’être mariée, le seul diplôme qui vaille d’être brandi est celui d’épouse. Je viens d’une famille où l’épanouissement d’une femme équivaut à la voir évoluer dans son foyer.
Dans ma famille, on se marie et c’est tout ! Et divorcer n’est pas une option.
Depuis toutes petites, ma mère nous l’a toujours dit.
Mes tantes ont même essayé de me marier à des cousins. J’ai toujours refusé, les mariages consanguins sont source de problème de famille, goor yi dagnou doyy waar, sans compter les risques de maladie, on assez de drépanocytaires dans la famille. Je n’ai pas envie de ramener un enfant SS.
J’ai bien fait de rabattre son clapet à cette petite voix dans ma tête. Et me suis empressée d’appeler ma meilleure amie, moom ndeyssane, elle n’a pas de chance, les hommes qu’elle fréquente finissent toujours par la trahir.
Devrai-je lui dire d’ailleurs ? Ça va peut-être lui faire mal et faire naître de la jalousie en elle. Mo kham dé (c’est son problème), je l’appelle quand même, pour lui annoncer la nouvelle. On a crié de joie toutes les deux, je me suis fait des films ! Khol bi dara nekkou si (elle a un cœur en or), dafa amoul chance rek (Elle n’as pas de bol!)

Photo trouvée sur le web d’une série sénégalaise à succès “Un café Avec”
Au bout de deux mois nous étions mariés, j’accédais enfin au titre tant convoité de Madame.
Je n’ai pas manqué d’exhiber fièrement ma bague au doigt devant mes copines encore célibataires. Je n’ai pas manqué de les convier toutes à mon mariage. Ce sera l’occasion pour elles de se rendre compte que je ne fais plus partie de ce cercle des laissés-pour-compte. Elles vont venir, s’asseoir entre elles et tout critiquer, ma tenue, ma coiffure, mon maquillage, la nourriture. Je m’en fous, elles veulent toutes être à ma place rek. La petite voix dans ma tête me dit que ma coiffure, mon maquillage et ma tenue sont un peu too much, faalé wou ma ko sakh !
Taaru djigueen moy seyy. Seyy naa nak. Je suis enfin mariée. On a fait la fête jusque tard dans la nuit. Après la réception, mes tantes ont défait ma coiffure et m’ont demandé d’enlever ma belle robe de mariée. Plus jamais je ne la porterai… Pendant qu’elles me préparaient à rejoindre mon foyer les doutes m’ont assailli, la réalité m’a rattrapée. Il ne me reste plus qu’à partir.
Les premiers jours passent la lune de miel se termine, je commence à m’apercevoir que je me suis mariée à un parfait inconnu. A quel moment c’est arrivé, comment me suis-je décidée, je n’en ai pas la moindre idée, il m’a parlé de mariage et j’ai accepté c’est tout.
C’est dans l’ordre normal des choses.
C’est ce que mes parents ont toujours voulu, c’est ce que j’ai toujours voulu, enfin, je crois.
De toutes les façons nous femmes ne tombons pas amoureuse c’est connu nous nous habituons juste à notre compagnon. Je m’habituerai comme d’autres avant moi, je ne suis pas la seule et encore moins la dernière.
Qu’importe ce que me dit cette maudite petite voix. J’apprendrai à le connaitre et à m’habituer à lui…
Auteure, podcasteuse, sénégalaise. Je suis passionnée d’écriture et je traite essentiellement de sujets autour de notre perception de l’autre, du jugement, des violences ordinaires… J’ai un premier recueil de nouvelles publié en 2018 que vous pourrez trouver ici… J’ai créé du Kokalam en 2017. Année après année, il continue de grandir.
De ces rencontres "hasardeuses", naissent parfois aussi les plus grands amours.
Je "plussoie"!!! C'est tellement vrai, ce que vous dites!